Que signifie l’expression « animal liminaire » ?

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Que signifie l’expression “animal liminaire” ?

Origine et usage

 Du latin limen, qui signifie “seuil”. On parle d’animaux “liminaires” ou “liminaux”. Cette notion a été proposée par les philosophes Sue Donaldson et Will Kimlicka en 2011 dans leur ouvrage Zoopolis: A Political Theory of Animal Rights (Zoopolis : une théorie politique des droits des animaux).

Cette expression désigne les animaux adaptés aux environnements anthropisés, c’est-à-dire qui vivent librement à proximité des humains (particulièrement en zone urbaine) mais qui ne sont ni domestiques, ni sauvages à proprement parler.

Il s’agit donc d’un concept politique relatif à l’éthique animale, à ne pas confondre avec les phénomènes écologiques de synanthropie (relation particulière avec des humains qui peut concerner des animaux, des plantes et des microorganismes) ou de commensalisme (relation qui peut concerner des animaux, des plantes et des microorganismes et n’implique pas forcément les humains).

Individus concernés et implications

Selon les époques et les territoires, différents animaux peuvent être inclus dans cette catégorie : canards colvert, chauve-souris, écureuils, étourneaux, goujons, lapins, mouettes, perches, pigeons, ratons laveurs, rats, renards, souris…

Souvent victimes d’indifférence, d’invisibilité sociale et politique, de déconsidération morale et de mépris, associés au manque d’hygiène et à la transmission de maladies, ils ne jouissent ni de l’affection couramment accordée aux animaux domestiques, ni du relatif respect qu’inspirent les animaux sauvages.

Un certain nombre d’entre eux subissent un environnement défavorable (pollution, capture de loisir, mobilier urbain dangereux…) et des campagnes de persécution sources de grandes souffrances : empoisonnement (hémorragies internes), piégeage, abattage.

L’usage de l’expression permet de mieux prendre en compte leurs intérêts en tant qu’individus et donc, de proposer des politiques qui  favorisent une cohabitation pacifique avec les humains, notamment via des méthodes de gestion non létales de leur population.

POUR ALLER + LOIN

Animal liminaire, Wikipédia
Commensalisme, Wikipédia
Synanthropie, Wikipédia

– Sue Donaldson et Will Kimlicka, Zoopolis : une théorie politique des droits des animaux, 2011 (éd. Alma, 2016 pour la traduction française)

Extrait : « Dans la mesure où nous partons du principe que les animaux sauvages devraient vivre dans la nature sauvage, les animaux liminaires sont souvent stigmatisés parce qu’ils sont des étrangers ou des envahisseurs pénétrant sans autorisation sur le territoire humain. Par conséquent, lorsque leurs intérêts entrent en conflit avec les nôtres, nous estimons avoir le droit de nous en débarrasser, soit par des pratiques massives de capture et/ou de relocalisation, soit tout simplement par des campagnes d’extermination au cours desquelles ils sont abattus ou empoisonnés. »
S. Donaldson et W. Kymlicka, Zoopolis, trad. P. Madelin, Alma éditeur, 2016, pp. 297-300.

– Estiva Reus, Quels droits politiques pour les animaux ? – Introduction à Zoopolis, Chapitre 4 – Les animaux résidents, Les Cahiers Antispécistes n°37, 2015

– Revue Ballast, Zoopolis — penser une société sans exploitation animale, 2018

– Association PAZ (Paris Animaux Zoopolis), Campagne dédiée aux animaux liminaires

– Astrid Guillaume, Les animaux « liminaires » : observations de terrain et précisions sémantiques, Sorbonne Université, 2021